RETOUR DE JÉSUS
ET
APOCALYPSE
Mais les justes sont en fête, ils exultent ; devant la face de Dieu ils dansent de joie.
Chantez pour Dieu, jouez pour son nom, frayez la route à celui qui chevauche les nuées. Son nom est Le Seigneur ; dansez devant sa face.
(Psaume 67 (68))
« Mais, quand le Fils de l’homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? »
(Luc 18, 8b)
Sommaire de la page
Jésus doit revenir sur Terre à la toute fin des temps pour juger les vivants et les morts. Elle est proche. Cette période extrêmement difficile pour l'Humanité est annoncée dans l'Apocalypse, texte du Nouveau Testament et période qui doit précéder immédiatement le retour de Jésus
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Que se passera-t-il lors du retour de Jésus, seconde venue du Seigneur sur Terre ?
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Quand Jésus reviendra-t-il ? ? Où ?
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L'Apocalypse précédera le retour de Jésus. Doit-on la craindre ? Deux films en 2022 l'évoqueront.
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La Résurrection de tous les morts
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En attendant ce retour, que propose Jésus ?
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Évangiles commentés sur le thème du retour de Jésus, et de l'Apocalypse
Que se passera-t-il
lors du retour de Jésus ?
L'arc-en-ciel représente l'Alliance que Dieu souhaite faire avec chacun d'entre nous, et qu'il souhaite que nous fassions aussi entre nous tous, les hommes, en nous aimant (notamment en nous supportant les uns les autres et en nous aidant). Les éclairs représentent la Puissance infinie de Dieu, sa Justice impartiale et aussi, en toute dernière extrémité car il est d'une infinie patience, sa colère.
Si Dieu est Amour, si sa Miséricorde est son plus grand attribut, il est aussi Justice.
À sa mort, chaque homme est jugé en fonction de l'amour qu'il a diffusé autour de lui pendant sa vie, amour pour Dieu, amour envers son prochain.
Or, à la toute fin des temps, lorsque le Christ reviendra, deuxième venue du Seigneur sur Terre, sonneront les trompettes de l'Apocalypse et un second jugement aura lieu, pour éradiquer le mal définitivement de toute la Création et établir le Royaume et Règne de Dieu éternels. Car si Jésus a définitivement vaincu le mal à la croix, les puissances obscures sont encore aux commandes du monde terrestre. Elles mettent tout en œuvre pour nous ravir l'héritage du Christ en nous tentant sans cesse, en nous incitant à la faute. Elles veulent nous entraîner avec elles dans leur chute définitive, sachant que leurs jours sont comptés.
Au moment de la parousie (retour) du Christ, chaque homme sur Terre se tournera vers lui, le reconnaissant comme l'Unique, le Seul, le Sauveur ultime.
Alors s'élèvera l'Église Apostolique du Christ, et commencera un règne éternel de paix, d'amour, sans larmes ni mal.
Le Règne de Dieu, c'est-à-dire la seigneurie de Dieu sur le cœur des hommes, ne vient pas "comme un fait observable", que l'on pourrait pronostiquer, programmer, fixer d'avance dans l'avenir. Ce n'est pas un projet de l'homme, mais le don de Dieu ; ce Règne de Dieu est déjà présent, déjà offert, déjà proposé : il est "parmi nous" à travers la présence et l'action de Jésus au milieu de nous.
Dieu ressuscitera alors tous les morts, sans exception, pour un Jugement Final, définitif.
Élévation de l'Église apostolique du Christ
« En ce temps-là se lèvera Michel, le chef des anges, celui qui se tient auprès des fils de ton peuple. Car ce sera un temps de détresse comme il n’y en a jamais eu depuis que les nations existent, jusqu’à ce temps-ci. Mais en ce temps-ci, ton peuple sera délivré, tous ceux qui se trouveront inscrits dans le Livre. Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour la honte et la déchéance éternelles. Ceux qui ont l’intelligence resplendiront comme la splendeur du firmament, et ceux qui sont des maîtres de justice pour la multitude brilleront comme les étoiles pour toujours et à jamais. »
(Daniel 12, 1-3)
Quand Jésus reviendra-t-il et où cela se produira-t-il ?
Jésus (aussi appelé le "Fils de l'Homme et Lion de Juda") reviendra aux temps décrits par Saint Jean dans le texte biblique nommé L'Apocalypse (mot qui signifie "révélation" et non pas "catastrophe")
C'est à Jérusalem qu'il reviendra et prendra possession de Son Église universelle. Tout comme l'éclair, présent partout au même instant, abolit toutes les distances, le Fils de l'Homme, par son avènement immédiat, imprévisible, irréfutable, effacera toute distance. Il sera tout entier au lieu surprenant où il se manifestera dans sa gloire.
« Je m'approcherai de vous pour le jugement, Et je me hâterai de témoigner contre les enchanteurs et les adultères, Contre ceux qui jurent faussement, Contre ceux qui opprime le salarié, Qui oppriment la veuve et l'orphelin, qui excluent l'immigré, et ne me craignent pas, Dit l'Éternel des armées. »
(Malachie 3, 5)
On ignore à quel moment Jésus reviendra. Ce retour est néanmoins imminent depuis 2000 ans (rappelons que pour Dieu, le temps n'existe pas), la venue de Jésus sur Terre ayant été le signal de du début de la fin des temps.
Dieu le Père décidera du jour et de l'heure du retour de Jésus. Un grand signe, celui du Christ, sera visible dans le ciel par tous. Peut-être s'agit-il de la croix...
Ce moment sera précédé d'une grande apostasie (perte de foi dans le monde) et de calamités nombreuses.
Dieu ne fait pas "durer" le plaisir en nous laissant, pour l'instant, sur terre, être aux prises avec l'ennemi. Le Père veut que tous soient sauvés et laisse aux hommes le temps pour se convertir. Il doit y avoir d'autres raisons, qui restent mystérieuses.
Peut-être Dieu le Père renverra-t-il Son Fils lorsque l'Homme aura atteint le bout du bout du chemin sans issue d'absurdité, d'individualisme, qu'il tisse lui-même et dans lequel il s'engage inexorablement : destruction des ressources de la planète au bénéfice de puissance et de gloire par l'argent ; mélange de cellules humaines, animales et robotiques ; humains rabaissés au rang d'acquéreurs perpétuels de marchandises et pucés pour leur "faciliter la vie", etc, et que l'homme sera dans une impasse telle qu'il lui sera impossible, sans l'aide de Dieu, de faire machine arrière.
La liste et les hypothèses sont infinies.
Doit-on craindre l'Apocalypse ?
En grec, Apocalypse signifie Révélation et non pas catastrophe. Le texte de l'Apocalypse, le dernier du Nouveau Testament (Bible) et attribué à l'apôtre préféré de Jésus, Saint Jean. Il l'aurait écrit sur l'île de Patmos – située au large d'Éphèse (ville localisée dans l'actuelle Turquie), assez peu de temps avant sa mort, suite à une vision du Christ. Elle contient des passages effrayants, bien qu'énigmatiques, donc d'interprétation difficile, qui ont de tout temps apporté de la crainte aux hommes ; 7 signes précurseurs de l'Apocalypse sont annoncés et la Bête portera le chiffre 666. Cette bête peut prendre différentes apparences, comme l'amour du pouvoir, de l'argent, une personne voulant exercer une domination mondiale sous couvert de vouloir le bonheur de l'humanité, etc.
Il est certain que le texte annonce que le retour de Jésus sera précédé de très grandes épreuves pour l'humanité, d'abominations en tout genre, et que ce sera aussi un temps extrêmement difficile pour l'Église et les chrétiens, non seulement en raison d'une apostasie (perte de la foi dans le monde) et aussi de persécutions. Or l'Occident vit une période d'apostasie sans précédent et les chrétiens sont devenus les personnes les plus persécutées dans le monde, notamment dans 73 pays différents.
Beaucoup pensent donc que l'Apocalypse a déjà commencé, d'autant que les drames liés au dérèglement climatique, à la folie de pouvoir et de domination des hommes atteignent presque un niveau irréversible.
Le Jour du Seigneur n'est pas redoutable pour ceux qui l'attendent, le guettent et le préparent ; et la venue du Fils de l'Homme ne surprendra pas ceux qui chaque jour vivent dans sa lumière. Et il n’y a pas lieu de se laisser envahir par la peur et la crainte, même si le ciel et la terre seront ébranlés et que la mer sera agitée. Car Dieu veut sauver le monde qu'il aime et qu'il a créé. Or Jésus a dit que lorsque les événements terribles précédant son retour auront lieu, il faudra croire, avoir confiance et prier. Il a bien précisé :
« Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche. »
(Luc 21, 28)
Ce verset surprenant est comme une invitation inattendue après un récit apocalyptique, qui frappe par sa violence. Comme un appel à l’espérance là où, à vue humaine, il n’y a plus d’espoir. Ce qui rend possible cet appel, c’est la certitude que le Christ est plus fort que tout désastre. En Galilée, il a marché sur les eaux du mal et de la mort. Par sa Passion, il marchera de nouveau et définitivement sur elles.
Cependant, Il faut que ceux qui n'ont pas encore réglé leurs problèmes avec Dieu le fassent dès à présent. C’est pendant que nous sommes sur la terre que Jésus a le pouvoir de pardonner les péchés et de donner la vie éternelle à celui qui se repent. Car lorsqu'il reviendra, la période de la grâce sera terminée.
Ce qui importe donc, c’est de se mettre à l’écoute des paroles du Christ qui ne passeront pas. Notre monde finira un jour ; mais la parole de Dieu, faite chair en la personne de Jésus, demeurera pour toujours. La venue du Christ dans notre monde nous libère de nos peurs et laisse entendre qu’il y a de l’avenir pour nous, qu’il y a quelque chose à attendre.
Le retour de Jésus ne sera pas un moment d'angoisse mais un grand moment de gloire, la fin du mal sur terre comme au ciel, et la victoire de Dieu, absolue. Définitive.
Alors confiance ! Jésus est vainqueur ! C'est lui le maître du monde, du mal et Dieu va restaurer la Création à l'état d'origine, telle qu'il l'avait créée.
© Jim Villager
La Passion du Christ 2 : La Résurrection
L'épreuve du Feu : les 7 églises de l'Apocalypse
Deux films en 2022 pour imaginer ce que pourrait être l'Apocalypse et le retour du Christ
La Passion du Christ 2 : La Résurrection
Mel Gibson a finalisé la suite de son film La Passion du Christ, avec Jim Caviezel dans le rôle de Jésus, sorti en 2004. Voici la bande annonce (en anglais) de La Passion du Christ 2 : La Résurrection, qui traite à la fois de la résurrection de Jésus et de l'Apocalypse, ainsi que du retour en Gloire de Jésus à la fin des fins des temps pour le Jugement Final. Sortie en 2022.
L'épreuve du Feu : les 7 églises de l'Apocalypse
Dans ce qui est devenu au fil des jours une quête personnelle, Christophe Hanauer, ingénieur, a parcouru l'Asie Mineure afin de réaliser une série documentaire sur les lieux cités dans le texte biblique l'Apocalypse de Saint Jean. Ce documentaire, en 9 épisodes de 26 minutes, a été diffusé en 2021. En voici la bande annonce du documentaire, puis une interview de Christopher Hanauer :
Christophe Hanauer et son ami Étienne Magnin ont le projet de déployer leur enquête, en la complétant, sous la forme de 3 longs-métrages qui reprendront une bonne partie des épisodes de la série.
Le premier de ces 3 longs-métrages documentaires, L’épreuve du Feu (partie 1), est désormais finalisé. Il sera diffusé en 2022.
En voici le synopsis
L'Asie Mineure au premier siècle de notre ère. Un basculement de civilisation est amorcé. Le christianisme se développe rapidement dans l’Est de l’Empire romain grâce aux textes de la Bible. Parmi eux se trouve l'un des livres les plus mystérieux jamais écrit : le livre de l’Apocalypse rédigé pour 7 églises se trouvant dans l'actuelle Turquie. Les visions et prophéties qu’il contient dévoile une guerre spirituelle qui déchaine les forces du Mal contre l'humanité dans les temps de la fin, l’opprimant avec la férocité d’une armée qui sait que le temps est compté…Ce texte, d'une troublante actualité, fût de tout temps une formidable source d'espoir pour tous ceux qui sont confrontés à l'épreuve du feu. Qu'a-t-il a dire à notre génération ?
Et voici la bande annonce
Lorsque Dieu ressuscitera tous les morts
« Selon Jésus, lorsque nous ressusciterons, nous ne deviendrons pas des anges, mais "comme" des anges. Nous aurons un corps de gloire, mais nos désirs ne seront plus les mêmes. Ce qui comptera dans la vie future, ce sera d'être fils et filles de Dieu. Certes, les époux de la terre, les amis se retrouveront, mais pour vivre en plénitude ce qu'ils auront cherché à deux sur la terre : l'amour de Dieu. La vie de Dieu sera tellement fascinante et le rayonnement de sa joie tellement intense que chaque âme, dans la gloire, n'aura de regard que pour Lui et de bonheur qu'en Lui. La communion des élus avec Dieu sera au-delà de toutes les amitiés et les contiendra toutes. Et ce que Jésus révèle de la vie future vaudra pour toute l'affectivité humaine : tout amour, fraternel ou filial, parental ou conjugal, qui en ce monde aura reflété la tendresse de Dieu, sera repris, transcendé et accompli dans le face à face avec le Dieu de la joie.
Nous ressusciterons parce que la puissance de Dieu, qui crée et qui sauve, nous ressuscitera. "Dieu n'est pas un Dieu de morts, mais de vivants". Si donc, lors de l'épisode du Buisson ardent, Dieu déclare à Moïse : "Je suis le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac et le Dieu de Jacob", c'est que ces hommes, bien que morts, sont gardés en vie et en dialogue avec Lui, prêts pour la résurrection.
De plus quand Dieu nous ressuscitera, il ne nous rendra pas la même vie, précaire et limitée, qu'auparavant, mais une vie entièrement nouvelle, qui sera une participation à la vie du Christ ressuscité, et donc une communion totale et définitive avec le Dieu vivant. »
© Frères Carmes
Évangiles sur le thème
du retour de Jésus
En attendant ce retour, que propose Jésus ?
En attendant son grand retour, Jésus vous attend le cœur rempli d'amour, il vous espère et vous ouvre ses bras. Il est le seul qui vous aimera toujours, ne vous sera jamais infidèle, ne vous décevra jamais, il est celui qui peut tout faire pour vous.
Il veille sur vous, vous suit du regard, il vous espère, il vous attend, il pose ses yeux amoureux sur vous, il veut vous rencontrer ! Ouvrez-lui votre cœur !
« À qui l’on a beaucoup donné,
on demandera beaucoup »
(Lc 12, 39-48)
« En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Vous le savez bien : si le maître de maison avait su à quelle heure le voleur viendrait, il n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison. Vous aussi, tenez-vous prêts : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. » Pierre dit alors : « Seigneur, est-ce pour nous que tu dis cette parabole, ou bien pour tous ? » Le Seigneur répondit : « Que dire de l’intendant fidèle et sensé à qui le maître confiera la charge de son personnel pour distribuer, en temps voulu, la ration de nourriture ? Heureux ce serviteur que son maître, en arrivant, trouvera en train d’agir ainsi ! Vraiment, je vous le déclare : il l’établira sur tous ses biens. Mais si le serviteur se dit en lui-même : “Mon maître tarde à venir”, et s’il se met à frapper les serviteurs et les servantes, à manger, à boire et à s’enivrer, alors quand le maître viendra, le jour où son serviteur ne s’y attend pas et à l’heure qu’il ne connaît pas, il l’écartera et lui fera partager le sort des infidèles. Le serviteur qui, connaissant la volonté de son maître, n’a rien préparé et n’a pas accompli cette volonté, recevra un grand nombre de coups. Mais celui qui ne la connaissait pas, et qui a mérité des coups pour sa conduite, n’en recevra qu’un petit nombre. À qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup ; à qui l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage. »
Jésus nous met en garde contre l'insouciance : il ne faut pas laisser le voleur percer le mur ! Attentifs à ne pas nous laisser surprendre, il nous faut être prêt pour la venue du Fils de l'Homme, même s'il tarde à venir.
Pour les disciples de Jésus, le maître qui tarde est facile à identifier : c'est le Christ monté aux cieux et qui reviendra inaugurer son règne définitif. Quant au serviteur de la parabole, c'est d'abord le (la) responsable de communauté, mais, plus largement, c'est chacun(e) de nous, car dans l'Église chacun(e) est en responsabilité, chacun(e) a part à la mission, chacun(e) travaille au compte du Maître.
Devant l'urgence du témoignage, il ne peut être question de prendre du bon temps ni de tirer un profit personnel des responsabilités assumées au nom du Seigneur. Et c'est à chacun(e) de nous que Jésus s'adresse lorsqu'il dit : "À qui l'on a beaucoup donné, on réclamera davantage."
Dieu nous a beaucoup confié. Comment ? En nous manifestant sa volonté. Connaître la volonté d'un Dieu qui est Père, c'est la grande chance du croyant, et cela doit susciter en nous l'action de grâces de tous les jours. Dieu nous a beaucoup confié : c'est dire qu'il nous a fait largement confiance. Et désormais toute notre existence de serviteurs ou de servantes se déploie sous le signe d'une Béatitude toute spéciale, la béatitude du travail, de la fidélité dans le quotidien, de la vigilance.
Heureuses êtes-vous, vous les servantes que le Maître en arrivant trouvera en train de veiller.
Pourquoi êtes-vous rassemblées aujourd'hui dans une même Eucharistie, dans une seule action de grâces ? Parce que le Maître a fait de vous ses intendantes, soit comme formatrices de sœurs plus jeunes, soit comme responsables de communauté, ou encore parce que vos sœurs ont souhaité pour vous ces temps forts de réflexion en vue d'un service communautaire, ou simplement en vue d'une présence plus libre et plus vraie au sein de la communauté.
Vous voilà donc établies par le Maître "sur sa maison", afin que vos sœurs trouvent toujours en temps voulu, pour chacune et pour toutes, "leur ration de froment", c'est-à-dire pour qu'elles puissent exister, dans le monastère, comme femmes, comme chrétiennes et comme consacrées. Et les trois vont ensemble, car une sœur ne serait pas chrétienne à part entière si elle n'allait au Christ avec son être de femme ; une sœur ne serait pas authentiquement consacrée à Dieu si elle ne mettait en œuvre toutes les énergies de son baptême chrétien.
C'est là, pour chaque sœur, l'œuvre de toute une vie, et cela réclame de chacune une vulnérabilité croissante à la parole de Jésus, un accueil toujours plus libre du travail de l'Esprit Paraclet. Mais parce que vous êtes intendantes dans la maison de Dieu, vous vous trouvez au service de chacune et de toutes pour leur foi vive au Dieu vivant et pour leur espérance vivante dans le Christ qui les régénère.
Heureuses êtes-vous, puisque toute votre vie devient une veille dans l'attente du Seigneur. Vous lui offrez votre souci du troupeau et votre espérance inlassable, vos longues patiences et votre gratuité à son service, et c'est lui qui, dans sa parabole, parle de récompense à propos du serviteur vigilant : "Vraiment, je vous le déclare, le maître lui confiera la charge de tous ses biens", non plus seulement la charge de la maisonnée, mais la gérance de tous ses biens, en son nom et place.
Curieuse générosité ! La récompense du bon serviteur, ce sera de servir encore plus, et de donner davantage ; mais avec une certitude qui le rendra heureux : il saura, il sentira la totale confiance de son Maître.
« On ramasse dans des paniers ce qui est bon »
(Mt 13, 47-53)
« En ce temps-là, Jésus disait aux foules : « Le royaume des Cieux est encore comparable à un filet que l’on jette dans la mer, et qui ramène toutes sortes de poissons. Quand il est plein, on le tire sur le rivage, on s’assied, on ramasse dans des paniers ce qui est bon, et on rejette ce qui ne vaut rien. Ainsi en sera-t-il à la fin du monde : les anges sortiront pour séparer les méchants du milieu des justes et les jetteront dans la fournaise : là, il y aura des pleurs et des grincements de dents. » « Avez-vous compris tout cela ? » Ils lui répondent : « Oui ». Jésus ajouta : « C’est pourquoi tout scribe devenu disciple du royaume des Cieux est comparable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et de l’ancien. » Lorsque Jésus eut terminé ces paraboles, il s’éloigna de là. »
Pour les Galiléens, le retour des barques de pêcheurs au petit matin était un spectacle familier, et Jésus s'en est inspiré pour la parabole d'aujourd'hui.
C'est sur le rivage que l'on peut apprécier la pêche, c'est sur le rivage que l'on a de bonnes surprises ou que l'on perd ses illusions.
De même il y aura un tri à la fin des temps, et personne ne saurait y échapper. On trouvera, pêle-mêle, dans le grand filet de l'histoire, du "beau" et du "moins beau", des justes et des mauvais. Et ce ne sera plus le temps des demi-mesures : quand le filet est tiré sur la grève, on n'a plus le temps de se demander si le demi-avarié est encore à moitié comestible : il n'y a de paniers que pour le poisson mangeable, le reste n'est pas intéressant ; on le rejette à l'eau sans se poser de questions.
Quant à nous, nous nous en posons une, et Jésus désire que nous nous la posions : irai-je dans le panier ? ou serai-je rejeté à la mer ? irai-je du côté des pleurs, ou du côté de la joie ? Question redoutable, si importante et si radicale qu'elle pourrait parfois induire de véritables malaises dans la vie spirituelle.
Et ici, il y a deux écueils à éviter :
Le premier serait d'éluder la question, en se disant : "Elle ne me concerne pas. Un bon chrétien ira forcément dans le panier, dans le panier des justes".
L'autre écueil serait de céder à la peur, la peur de soi et la peur de Dieu.
D'un côté la suffisance de l'insouciance, de l'autre toutes les formes du désespoir. Or l'Évangile ne veut ni l'un ni l'autre. L'attitude que Jésus attend de nous et qu'il veut nous inculquer par sa parabole, c'est une sorte de réalisme de la foi, à base d'humilité et de confiance.
Humilité, car la force pour être fidèle ne viendra pas de nous ; confiance, parce que rien ni personne ne nous arrachera jamais de la main du Père ni de la main de Jésus, et parce que Dieu veut notre bonheur plus encore que nous ne le voulons nous-mêmes.
Humilité, car les consacrés eux aussi doivent manger chaque jour à la table des pécheurs ; confiance, parce que Jésus nous a aimés et s'est livré pour nous : "Il n'y a plus de condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus " (Rm 8,1)
Humilité, car l'argile vivante que nous sommes peut toujours trahir la main du Potier, confiance, car le Potier peut toujours repétrir en objet d'art l'argile qui l'a déçu. Elles sont si fortes, elles sont si douces, les mains de Dieu, si habiles et si précises ! Ce sont des mains d'artiste, ce sont des mains de Père, qui à la fois redressent et libèrent, à la fois remodèlent et guérissent. Saint Irénée les a nommées : les mains du Père sont pour nous le Verbe et l'Esprit.
De la parabole de Jésus nous pouvons tirer une autre leçon, qui va, elle aussi, dans le sens du réalisme de la foi : si nous voulons aborder sereinement le grand tri de la fin des temps, le moment de vérité à la fin de notre vie, le plus sûr et le plus apaisant est d'anticiper nous-mêmes le triage, d'opérer nous-mêmes, chaque jour, le discernement de ce que nous voulons vivre ou privilégier. C'est la grâce que Salomon demandait à Dieu dans sa prière : recevoir de lui un "cœur écoutant", capable d'entendre Dieu et de discerner sa volonté.
Dans le filet de notre cœur, nous ramassons tant de choses, et parfois n'importe quoi ; du dévouement, de la simplicité, de la tendresse, mais aussi des désirs qui nous encombrent, des amertumes qui nous rongent, des agressivités qui s'entassent dans notre mémoire et nous rendent malheureux ou désagréables.
C'est chaque jour, en pleine mer, en pleine vie, qu'il nous faut faire le choix, sous le regard de Dieu, avec le nouveau regard que Jésus nous donne, afin de ramener au port uniquement ce qui nous fera vivre, nous et ceux que Dieu nous donne à aimer.
Choisir la vie, c'est cela qui rend heureux.
« Quand ces événements commenceront,
redressez-vous et relevez la tête »
(Lc 21, 20-28)
« En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Quand vous verrez Jérusalem encerclée par des armées, alors sachez que sa dévastation approche. Alors, ceux qui seront en Judée, qu’ils s’enfuient dans les montagnes ; ceux qui seront à l’intérieur de la ville, qu’ils s’en éloignent ; ceux qui seront à la campagne, qu’ils ne rentrent pas en ville, car ce seront des jours où justice sera faite pour que soit accomplie toute l’Écriture. Quel malheur pour les femmes qui seront enceintes et celles qui allaiteront en ces jours-là, car il y aura un grand désarroi dans le pays, une grande colère contre ce peuple. Ils tomberont sous le tranchant de l’épée, ils seront emmenés en captivité dans toutes les nations ; Jérusalem sera foulée aux pieds par des païens, jusqu’à ce que leur temps soit accompli. Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées et désemparées par le fracas de la mer et des flots. Les hommes mourront de peur dans l’attente de ce qui doit arriver au monde, car les puissances des cieux seront ébranlées. Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans une nuée, avec puissance et grande gloire. Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche. »
Deux images, en surimpression : cela suffit à saint Luc pour évoquer la pensée de Jésus sur l'histoire des hommes et la fin des temps.
Au premier plan : la chute de Jérusalem, avec le cortège habituel des catastrophes nationales : massacres, dispersion, captivité.
En arrière-fond : la venue en gloire du Fils de l'Homme, que Luc peint avec les couleurs vives traditionnelles des apocalypses, sur l'horizon de la fin du monde.
Entre les deux : "le temps des nations", ou des païens, qui donne au tableau la profondeur de champ, mais dont Jésus n'a jamais précisé la durée : "Il ne vous appartient pas, disait-il, de connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité" (Ac 1,7). Le temps des nations, c'est le temps de la mission, le temps de l'Église, de la patience et du service ; c'est notre temps de disciples, témoins de Jésus-Christ.
Toutes les composantes du malheur semblent s'être donné rendez-vous dans ce fragment de discours. Jésus y parle de dévastation, de détresse, d'angoisse et de frayeur. Puis, brusquement, balayant d'un revers de main toutes les ombres et tous les fantasmes de souffrance, il exhorte les disciples à l'espérance et à la fierté :
"Lorsque cela commencera d'arriver, redressez-vous et relevez la tête, car votre délivrance est proche !"
Quand les épreuves commenceront à s'accumuler, quand toute issue sera fermée, quand la violence semblera victorieuse, "redressez-vous, relevez la tête !"
Quand tout appui se sera éloigné, quand Dieu lui-même vous paraîtra trop absent pour écouter, trop lointain pour répondre, redites-vous : "La délivrance est proche ; le Fils de l'Homme vient nous sauver !"
Cette consigne d'espérance, la génération du Christ l'a ressaisie lors de la chute de la Ville sainte ; le peuple de Dieu tout entier l'entendra de nouveau au terme de l'histoire ; mais elle vient nous surprendre et nous réconforter, nous les témoins de Jésus, tout au long du temps des nations, en chaque aujourd'hui de l'Église.
Chaque épreuve du peuple saint réédite en effet la détresse de Jérusalem et anticipe sur les douleurs dernières qui marqueront l'avènement du Fils de l'Homme. Mais, en raison de la folie d'amour que Dieu a faite pour le monde, il est encore plus vrai de dire que chaque épreuve, personnelle ou communautaire, nous situe, dans la foi, entre les deux victoires du Christ : sa victoire de Pâques, après le Golgotha, et sa victoire à la fin des temps, qui nous fera surgir de la mort.
C'est pourquoi, dans toutes ces paroles de Jésus sur les détresses de l'histoire et sur la fin du monde, nous avons à entendre avant tout un appel à la vigilance, personnelle et communautaire, et une promesse de la gloire.
Certes, le monde connaît des soubresauts, en ce début du nouveau millénaire ; certes nous percevons le désarroi de tant d'hommes et de femmes, de tant de jeunes, qui ne trouvent plus de repères face à un avenir qui leur semble menaçant ; et nous nous surprenons nous-mêmes à retomber dans la crainte, comme sous le coup d'un esprit de servitude (Rm 8,15). Mais nous avons reçu, en réalité, l'Esprit de filiation, qui nous fait crier, depuis la terre des hommes : "Abba, Père !"
Voilà pourquoi, par fidélité au Dieu de notre appel, et en solidarité avec ceux qui n'ont pas d'espérance, humblement, joyeusement, "nous nous redressons et relevons la tête", pour rendre témoignage, dès aujourd'hui, à la victoire de Jésus.
« Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite »
(Lc 13, 22-30)
« En ce temps-là, tandis qu’il faisait route vers Jérusalem, Jésus traversait villes et villages en enseignant. Quelqu’un lui demanda : « Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? » Jésus leur dit : « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et n’y parviendront pas. Lorsque le maître de maison se sera levé pour fermer la porte, si vous, du dehors, vous vous mettez à frapper à la porte, en disant : “Seigneur, ouvre-nous”, il vous répondra : “Je ne sais pas d’où vous êtes.” Alors vous vous mettrez à dire : “Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné sur nos places.” Il vous répondra : “Je ne sais pas d’où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui commettez l’injustice.” Là, il y aura des pleurs et des grincements de dents, quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob, et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous-mêmes, vous serez jetés dehors. Alors on viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu. Oui, il y a des derniers qui seront premiers, et des premiers qui seront derniers. »
"Seigneur, est-ce le petit nombre qui sera sauvé ?"
Voilà bien le genre de questions auxquelles Jésus ne répondait jamais directement : les dates, les délais, les nombres, tout cela, à ses yeux, n'était que vaine curiosité. On lui demande une sécurité ; il répond par une exigence. On lui demande : "Y aura-t-il beaucoup de sauvés ?"; il répond calmement : "Tâche d'être de ceux-là ! Rien n'est fait d'avance : il faut entrer, donc vouloir entrer, et la porte est étroite".
La porte étroite, c'est peut-être le portillon qu'on laissait ouvert un moment quand déjà les grandes portes de la ville étaient fermées pour la nuit ou en temps de trouble. Dans ce cas, c'est une porte de miséricorde pour les retardataires et pour ceux qui se sont laissé surprendre au dehors par la fermeture qu'ils auraient dû prévoir.
Mais de toute façon, qu'il s'agisse d'une porte malcommode pour une foule ou d'un portillon commode parce qu'il reste ouvert, il faut toujours saisir l'occasion et entrer à temps dans la ville.
Pour les auditeurs de Jésus, sa parabole a dû être limpide. Ils ont sans doute compris que Jésus les pressait de venir à la foi : "Hâtez-vous d'entrer par la porte que je vous offre, sinon d'autres entreront avant vous, des croyants venus du levant et du couchant, du nord et du midi, qui seront, par leur foi, plus que vous fils d'Abraham, plus que vous de la race des prophètes.
Pour nous les paroles de Jésus sur la porte étroite et la porte fermée cachent une part de mystère. Comme toutes les paraboles de Jésus, elles nous suggèrent un programme de réflexion, jamais achevé, jamais clos; et parmi les différentes manières de les comprendre, il nous faut choisir celle qui est la plus consonante avec l'ensemble de sa pensée.
Jésus ne voulait sûrement pas évoquer des hommes qui se bousculent pour forcer un portillon, comme s'il disait : "Puisque la porte est étroite, joue des coudes, toi aussi, dans la foule, et tu auras tes chances." Jamais en effet Jésus n'a enseigné qu'il fallait évincer des frères pour entrer dans le Règne de Dieu ; jamais Jésus n'a voulu dire : "Les places sont rares, et elles reviendront au plus fort ou au plus malin."
Il a pu vouloir dire : "La porte n'est pas large, et il faut s'y présenter à temps." Mais il semble que Jésus insiste ici moins sur l'étroitesse de la porte que sur l'urgence de s'y engager : "La porte est étroite, certes, mais ce n'est pas grave : on peut toujours passer avec un minimum d'effort ; faites vite, cependant, car la porte un jour sera fermée." Là nous rejoignons de nombreuses paraboles et de nombreuses affirmations de Jésus sur la venue imprévisible de la fin, fin de la présence de Jésus sur terre, fin du monde, ou mort de chaque homme. Et Jésus d'expliquer sa pensée par la parabole du maître de maison.
Une chose est claire : la porte se refermera ; l'histoire du monde sera close un jour, et chaque humain, pour son compte, tournera un jour la dernière page de sa vie. Cela, le Seigneur ne l'oublie pas, et il ne veut pas que nous l'oubliions. Il est doux, miséricordieux, mais son amour est fort et nous ramène sans cesse devant le sérieux de la vie. Jésus sauveur sait trop bien que nous ne serons jamais vraiment heureux tant que nous n'irons pas jusqu'au bout de notre loyauté et de notre réponse. Quand le moment viendra où nos lenteurs n'auront plus cours, nous aurons beau frapper, crier : "Seigneur, ouvre-nous !", nous aurons beau dire : "Enfin, Seigneur... j'étais de tes amis !" Jésus nous répondra : "Mes vrais amis sont déjà entrés."
« Il rassemblera les élus
des quatre coins du monde »
(Mc 13, 24-32)
« En ce temps-là, Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « En ces jours-là, après une grande détresse, le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus sa clarté ; les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées. Alors on verra le Fils de l’homme venir dans les nuées avec grande puissance et avec gloire. Il enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde, depuis l’extrémité de la terre jusqu’à l’extrémité du ciel. Laissez-vous instruire par la comparaison du figuier : dès que ses branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l’été est proche. De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte. Amen, je vous le dis : cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive. Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. Quant à ce jour et à cette heure-là, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père. »
Beaucoup de gens, même parmi les chrétiens, essaient d'imaginer la fin du monde. On en fait des romans, on en fait des films, comme si l'important était de faire peur. Mais est-ce vraiment ainsi que Jésus voyait les choses ?
Une chose est sûre, et Jésus l'a dit formellement, c'est que sa venue en gloire marquera la fin de l'histoire ; et cette fin, il nous faut à la fois l'attendre, l'espérer et la préparer. Comme le dit notre Credo : "J'attends la résurrection des morts et la vie du monde à venir".
Jésus n'a présenté aucun scénario des derniers temps : il se contente de les évoquer en reprenant les images traditionnelles des prophètes, spécialement Daniel, qu'il cite très souvent.
Néanmoins Jésus, dans ce passage de Marc 13, distingue trois moments :
Le commencement des douleurs : Jésus décrit là tout ce que les générations de chrétiens depuis lors ont connu : les guerres, les tremblements de terre, les faux messies et les persécutions. Le temps des douleurs est-il uniquement un temps de catastrophe ? Non, car c'est aussi le temps où l'Évangile est proclamé à toutes les nations et où l'Esprit Saint parle lui-même pour la défense des disciples de Jésus. D'ailleurs les douleurs sont des douleurs d'enfantement : l'humanité selon Dieu, l'Église de Jésus, est enfantée tout au long de ce commencement.
Viennent ensuite, dans l'Évangile de Marc, "les jours de détresse", qui visent probablement une épreuve plus précise, comme les combats qui ont marqué la prise de Jérusalem. Mais la fin du monde est encore autre chose. Elle aura lieu "en ces jours-là, après cette détresse". L'histoire des hommes s'arrêtera ; le soleil et la lune cesseront de marquer les jours et les nuits.
Alors on verra le Fils de l'Homme (Jésus Fils de Dieu), venir, entouré de nuées, dans la plénitude de la puissance et dans la gloire.
La fin du monde sera surtout l'irruption du monde nouveau, la manifestation de la gloire du Christ, et l'immense rassemblement de tous les amis de Jésus, tous ses fidèles, les élus de tous les pays et de tous les temps.
Est-ce là une catastrophe ? Non : c'est la réussite du plan de Dieu, c'est le moment, connu de Dieu seul, où Il déclarera : "C'est fait ; mon amour a réussi l'homme", c'est le moment de l'enfantement après les douleurs, c'est le premier cri de l'humanité nouvelle, qui ouvrira les yeux à la gloire du Christ.
La fin du monde, c'est l'été de Dieu, et Jésus y insiste.
Qu'est-ce qui rend si tendres les jeunes pousses du figuier ? Qu'est-ce qui fait apparaître les feuilles ? – La sève, tout simplement. Et quand la sève monte, les fruits viennent, sûrement ; l'été arrive, immanquablement ; de même que, lorsque les douleurs surviennent, c'est que l'enfant demande à naître et à vivre.
Voilà ce qu'est la fin du monde, aux yeux de Jésus : c'est la poussée victorieuse de la sève ; c'est la naissance de l'homme nouveau selon Dieu.
Les hommes guettent partout la catastrophe ; or la fin du monde sera un moment de maturité, le moment de la maturité. Déjà le prophète Daniel l'annonçait de la part de Dieu : "En ce temps-là viendra le salut de tous les peuples, de tous ceux dont le nom se trouvera dans le livre de Dieu".
Oui, c'est parfois dans la douleur que nous nous préparons à cette victoire de Dieu.
Oui, il y a et il y aura des jours de détresse, et c'est pourquoi nous devons rester éveillés, "tout éveillés dans notre foi" et dans l'amour fraternel, serrant dans le creux de notre main la perle du Royaume, c'est-à-dire la promesse que Jésus nous a faite et la promesse que nous avons faite à Jésus.
Mais Jésus nous a sauvés une fois pour toutes : il n'aura pas besoin de se lever à nouveau pour souffrir et mourir. Il s'est assis, pour toujours, à la droite de Dieu.
« Restez éveillés et priez en tout temps » (Lc 21, 34-36)
« En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s’alourdisse dans les beuveries, l’ivresse et les soucis de la vie, et que ce jour-là ne tombe sur vous à l’improviste comme un filet ; il s’abattra, en effet, sur tous les habitants de la terre entière. Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme. »
Les années passent, au service du Seigneur ; et normalement notre vie toute donnée à la prière et au service fraternel devrait devenir de plus en plus libre et légère sous le regard de Celui qui nous aime. À cela tendent tous nos efforts spirituels et toutes nos conversions, et c'est bien le désir que fait monter en nous la parole de Jésus.
Pourtant, même quand nous cherchons loyalement notre chemin de fidélité, nous prenons conscience, de loin en loin, d'une pesanteur qui s'est installée en nous malgré nous, et qui nous empêche d'être heureux sans contrainte de l'appel et de la présence du Seigneur.
Pesanteur de l'intelligence, qui devient comme rétive aux choses de Dieu et aux approches de son mystère. Pesanteur de notre mémoire, qui demeure collée aux événements quotidiens et ne se nourrit plus des merveilles de la foi. Pesanteur de notre désir, qui ne vise plus, apparemment, que des joies immédiates ou des facilités à court terme.
"Tenez-vous sur vos gardes, nous dit Jésus aujourd'hui, de peur que vos cœurs ne s'appesantissent". Et il mentionne les dangers de la débauche et de l'ivrognerie, dont par grâce, heureusement, nous sommes préservés ; mais il ajoute, comme cause d'appesantissement, "les soucis de la vie", les soucis pour la vie, qui habitent tous les cœurs humains, même au cloître.
Selon Jésus, un cœur appesanti est un cœur qui perd ses réflexes et sa présence aux êtres et aux événements. Un cœur immergé dans les soucis "biotiques" (mérimnai biôtikai) devient vulnérable à l'imprévu ; il se laisse surprendre et paralyser. Si nous ne restons pas sur nos gardes, "le Jour de Dieu fondra sur nous comme un filet" de chasseur, qui interdit tout mouvement, toute échappée, toute fuite.
Le remède est simple, et Jésus y revient souvent quand il parle de l'avenir et des événements ultimes qui accompagneront son retour : "Veillez et priez en tout temps". C'est tout le programme spirituel de l'Avent qui va commencer : demeurer vigilants, quel que soit notre passé de louange et de service, et rester par la prière en dialogue d'amour avec le Seigneur de notre appel.
Le Jour du Seigneur n'est pas redoutable pour ceux qui l'attendent, le guettent et le préparent ; et la venue du Fils de l'Homme ne surprendra pas ceux qui chaque jour vivent dans sa lumière. Si nous veillons, debout, pour appeler et servir Celui qui vient, nous serons debout devant lui dès qu'il paraîtra. Non pas debout comme raidis dans notre fierté et notre triomphe, mais debout dans le respect et la confiance, pour accueillir le Seigneur en gloire et pour entrer, heureux, dans son accueil et sa gloire.
Vigilance et prière seront pour nous, durant l'Avent, comme deux visages de notre espérance. Ce seront aussi pour nous, au cœur de l'Église, deux manières de vivre d'amour et de porter le monde, à l'imitation de la Mère du Messie.
« Va sur les routes et dans les sentiers »
(Lc 14, 15-24)
« En ce temps-là, au cours du repas chez un chef des pharisiens, en entendant parler Jésus, un des convives lui dit : « Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu ! » Jésus lui dit : « Un homme donnait un grand dîner, et il avait invité beaucoup de monde. À l’heure du dîner, il envoya son serviteur dire aux invités : “Venez, tout est prêt.” Mais ils se mirent tous, unanimement, à s’excuser. Le premier lui dit : “J’ai acheté un champ, et je suis obligé d’aller le voir ; je t’en prie, excuse-moi.” Un autre dit : “J’ai acheté cinq paires de bœufs, et je pars les essayer ; je t’en prie, excuse-moi.” Un troisième dit : “Je viens de me marier, et c’est pourquoi je ne peux pas venir.” De retour, le serviteur rapporta ces paroles à son maître. Alors, pris de colère, le maître de maison dit à son serviteur : “Dépêche-toi d’aller sur les places et dans les rues de la ville ; les pauvres, les estropiés, les aveugles et les boiteux, amène-les ici.” Le serviteur revint lui dire : “Maître, ce que tu as ordonné est exécuté, et il reste encore de la place.” Le maître dit alors au serviteur : “Va sur les routes et dans les sentiers, et fais entrer les gens de force, afin que ma maison soit remplie. Car, je vous le dis, aucun de ces hommes qui avaient été invités ne goûtera de mon dîner.”»
L'invitation avait été lancée depuis longtemps, et l'on attendait une fête splendide. Mais, le moment venu, tout risque d'échouer, parce que tous les invités, à la dernière minute, se trouvent des excuses.
Ce sont les excuses classiques : les affaires, le travail, les liens d'affection. À vrai dire, dans la vie courante, toutes ces excuses sembleraient valables. D'ailleurs le dernier des invités ne songe même pas à s'excuser : "Je viens de me marier, et c'est pour cela que je ne puis venir." Cela va de soi, et l'homme au banquet serait mal venu d'insister.
Pourtant, dans la parabole, il se fâche ; et c'est par ce détail inattendu que Jésus veut attirer l'attention de ses auditeurs.
Pourquoi cette colère ? Quel est donc ce banquet où l'on doit se hâter, toutes affaires cessantes ? Les fils d'Israël, nourris de la lecture des prophètes, ont compris tout de suite : il s'agit du banquet messianique, du "repas dans le Royaume de Dieu". Dès lors la grande affaire, ce n'est plus d'acheter un champ ou des bœufs ; ce n'est même plus de prendre sereinement le temps du bonheur, mais c'est d'entrer à temps au banquet de Dieu qui durera toute l'éternité. Car les excuses qui seraient valables en d'autres circonstances ne le sont plus quand c'est Dieu qui invite.
Dieu convoque toujours à temps, et il envoie toujours à temps dans nos vies le messager ou le signe qui viennent nous dire : "C'est maintenant ; il t'attend".
Mais tant de choses passent avant Dieu et avant les choses de Dieu !
Il y a les choses possédées qui obsèdent le cœur, et les choses désirées qui le rongent encore plus ; il y a le souci de rendement ... c'est tellement rationnel d'essayer ses bœufs, de faire valoir ses dons ! Il y a surtout les attaches du cœur, tout ce jeu subtil d'antipathies et de sympathies naturelles qui nous fixent sur les consolations immédiates.
Vient un moment où l'on ne peut plus attendre, où l'on ne doit plus rien mettre en travers de la route de Dieu, sous peine de se retrouver devant la porte fermée de son banquet, avec le bouquet fané d'une vie égoïste qui n'aura servi à rien ni à personne.
De toute façon, même si nous nous dérobons, Dieu, lui, n'échouera pas. Et Jésus, une fois de plus, en avertit ses contemporains. Si les premiers choisis se récusent, Dieu leur trouvera des suppléants, dans les rues de la ville, et même, s'il le faut, dans la campagne ; entendons : parmi les gens méprisés et jusque parmi les païens, en Israël et hors d'Israël. Et chaque fois que, dans notre existence pourtant consacrée, nous sommes tentés de nous assoupir ou de céder à la facilité, l'avertissement de Jésus nous rejoint : avec ou sans nous, Dieu remplira sa maison. Mais si nous forçons Dieu à nous trouver des remplaçants, qui pourrons-nous trouver pour remplacer Dieu ?
À vrai dire, nous n'avons aucune envie de remplacer Dieu dans notre vie, puisque c'est lui-même qui est toute notre vie ; nous ne voulons pas d'autre richesse, pas d'autre réussite, pas d'autre bonheur que de veiller dans la prière, la lampe allumée, fascinés par le Christ, guettant son passage, attendant son retour.
Nous avons "choisi d'être là" (Ps 84,11), dans la maison de louange, pour la gloire de Dieu et le salut du monde, et chaque jour, dans sa maison, Dieu nous invite à son festin, à la table de la parole et à la table de l'Eucharistie ; chaque jour nous répondons, ensemble, avec tout notre désir et toutes nos misères, à l'appel du Seigneur, et la maison est pleine, pleine de pauvres, d'infirmes et d'aveugles, que Jésus est allé chercher sur les routes du monde.
Pauvres de Dieu, nous savons où est notre trésor, et parce que nous avons pressenti un jour l'amour de Celui qui appelle, pour rien au monde nous ne voudrions manquer, aujourd'hui, son invitation
« Prenez garde de ne pas vous laisser égarer »
(Lc 21, 5-11)
« En ce temps-là, comme certains parlaient du Temple, des belles pierres et des ex-voto qui le décoraient, Jésus leur déclara : « Ce que vous contemplez, des jours viendront où il n’en restera pas pierre sur pierre : tout sera détruit. » Ils lui demandèrent : « Maître, quand cela arrivera-t-il ? Et quel sera le signe que cela est sur le point d’arriver ? » Jésus répondit : « Prenez garde de ne pas vous laisser égarer, car beaucoup viendront sous mon nom, et diront : “C’est moi”, ou encore : “Le moment est tout proche.” Ne marchez pas derrière eux ! Quand vous entendrez parler de guerres et de désordres, ne soyez pas terrifiés : il faut que cela arrive d’abord, mais ce ne sera pas aussitôt la fin. » Alors Jésus ajouta : « On se dressera nation contre nation, royaume contre royaume. Il y aura de grands tremblements de terre et, en divers lieux, des famines et des épidémies ; des phénomènes effrayants surviendront, et de grands signes venus du ciel. »
En écho à la fête du Christ Roi, la liturgie nous fait méditer toute cette semaine un chapitre de saint Luc où Jésus parle longuement de l'avenir.
Tantôt il envisage l'avenir lointain, son retour à la fin des temps et tout un cortège d'événements mystérieux dont la date reste cachée dans le secret du Père. Quand il évoque ce scénario de la fin, Jésus le fait toujours dans le langage traditionnel des apocalypses et dans un grand cadre cosmique qui englobe la terre et le ciel, le soleil, la lune et les étoiles.
Tantôt Jésus a en vue des événements plus proches : la ruine du Temple, le jugement de Jérusalem ; et dans ce cas il reprend volontiers les menaces des prophètes contre la ville infidèle.
Tantôt enfin Jésus fait allusion aux épreuves de sa communauté, aux persécutions qui frapperont les disciples, tout au long du temps de l'Eglise.
Ce qui nous déroute un peu dans ce discours de Jésus, c'est que les trois perspectives sont étroitement imbriquées et parfois indissociables, comme des photographies que l'on projette en surimpression : derrière la destruction du Temple se profilent les signes de la fin du monde, et en toile de fond du jugement de Jérusalem on discerne la venue du Fils de l'Homme pour juger les vivants et les morts.
Impossible de calculer ; inutile de prévoir. Mais deux certitudes ressortent clairement. La première est que l'histoire du monde est entrée avec la venue de Jésus dans sa phase définitive, même si celle-ci doit durer encore des centaines ou des milliers de siècles. La seconde certitude est que les consignes de Jésus, urgentes pour aujourd'hui, resteront valables jusqu'à la fin des temps : il faut espérer, il faut veiller.
L'évangile d'aujourd'hui nous place successivement devant deux perspectives.
Jésus annonce d'abord la ruine du Temple : "Des jours vont venir où il n'en restera pas pierre sur pierre. Tout sera détruit." D'où la question des disciples, qui porte, elle aussi, sur ce désastre du Temple : "Maître, quand donc cela arrivera-t-il ? et quel sera le signe que cela doit avoir lieu ?" Et Jésus de répondre, non pas en dévoilant un signe précis, mais en donnant une consigne valable en tout temps d'épreuve : "Prenez garde de ne pas vous laisser abuser" (par de faux messies) qui diront : " le moment est arrivé".
Puis saint Luc, presque sans transition, ouvre jusqu’au fond la perspective en reprenant une parole de Jésus qui concerne la fin des temps : "Il y aura de grands tremblements de terre et des faits terrifiants venant du ciel, et de grands signes".
L'avenir n'appartient qu'à Dieu, qui seul connaît les repères ultimes du temps et de l'espace. Mais nous avons le temps du jour pour le servir et l'aimer, nous avons l'espace de notre cœur pour y accueillir la parole de Jésus, et l'espace du monde à prendre dans la prière, avec tous les missionnaires porteurs de son message de paix.
« Sachez que le royaume de Dieu est proche »
(Lc 21, 29-33)
« En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples cette parabole : « Voyez le figuier et tous les autres arbres. Regardez-les : dès qu’ils bourgeonnent, vous savez que l’été est tout proche. De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le royaume de Dieu est proche. Amen, je vous le dis : cette génération ne passera pas sans que tout cela n’arrive. Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. »
La température brusquement s'est refroidie ; on se hâte en marchant, les plantes font le gros dos sous la gelée blanche, la couche de gel descend chaque jour dans le sol. Et pourtant nous ne sommes pas inquiets. Nous disons : "C'est du temps de saison ; le printemps viendra à son heure".
De fait il ne manquera pas au rendez-vous, car depuis que la terre porte la vie, le cycle des saisons a "répondu" à l'ordre du Créateur (Os 2,22). Et quand sera revenu le temps des bourgeons, des fleurs et des feuilles, nous dirons, avec la même assurance, avec la même confiance dans l'avenir : "les fruits vont venir avec l'été et l'automne.
De même nous avons assisté, et nous assistons encore, après les guerres froides, à des poussées de sève dans l'histoire du monde. Nous avons dit : "cela bourgeonne en Pologne, en Tchécoslovaquie, en Russie". Encore aujourd'hui des peuples longtemps condamnés au silence relèvent la tête, sentant leur délivrance toute proche ; et l'Église, qui a mission d'amener tous les peuples à la lumière du Christ, vit intensément, avec ses enfants de toutes langues et de tous pays, ces fièvres et ces soubresauts d'un monde en quête de paix et de bonheur. Mais elle a reçu de son Seigneur la consigne de ne pas céder à l'inquiétude et d'attendre sereinement l'été après tous les bourgeonnements de l'histoire.
Car le monde n'est pas en marche vers l'échec, vers les ténèbres, vers un hiver inexorable. Nous allons vers l'été de Dieu, l'été de la dernière moisson, où Dieu engrangera la charité des hommes de tous les temps. Et à cet été Jésus donne deux autres noms: la délivrance et le Règne de Dieu.
Il y aura, à la fin des temps, une ultime délivrance et l'instauration du règne de Dieu dans les cœurs, et de cet événement définitif nous ne savons ni l'heure, ni le jour, ni le siècle ni le millénaire. Simplement, quand la sagesse de Dieu préparera ce Jour, son Esprit Saint nous en dévoilera les signes précurseurs.
Mais il y a, tout au long du temps, dans la vie des peuples, des communautés, des familles et de chaque croyant, des bourgeonnements passagers qui annoncent des étés transitoires, des reprises de croissance qui amènent de vrais moments de maturité, des conversions du cœur qui inaugurent des étapes de délivrance.
Et même si le Règne de Dieu, dans son stade final, demeure caché pour nous dans un avenir impénétrable, ce même Règne de Dieu, cette seigneurie d'amour, travaille déjà l'histoire qui se fait sous nos yeux. Déjà elle suscite des renouveaux et mûrit des récoltes ; déjà elle transforme les familles et remodèle les communautés ; et en nous-mêmes, dès que nous laissons travailler la sève de l'Évangile, le Règne de Dieu se fait tout proche, tangible, attirant.
"Voici, disait Jésus, que le Règne de Dieu est au milieu de vous".
Dans les cœurs des chrétiens comme dans l'Église, le printemps de la grâce est toujours à l'œuvre, et il y a toujours un été qui se prépare.
Formidable optimisme dans le cœur de Jésus. Très douce espérance pour nos cœurs d'hommes.
« Ma chair est la vraie nourriture »
(Jn 6, 51-59)
« En ce temps-là, Jésus disait aux foules des Juifs : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. » Les Juifs se querellaient entre eux : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. Tel est le pain qui est descendu du ciel : il n’est pas comme celui que les pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. » Voilà ce que Jésus a dit alors qu’il enseignait à la synagogue de Capharnaüm. »
Déjà les Sages d'Israël voyaient dans le pain et le vin des images de la nourriture spirituelle. Ainsi, dans la première lecture, tirée du livre des Proverbes, la Sagesse de Dieu, personnifiée comme une femme prophétesse, proclame à tout venant sur les hauteurs de la Cité sainte :
« Si vous manquez de sagesse, venez à moi ! Venez manger mon pain et boire le vin que j'ai préparé ! Quittez votre folie, et vous vivrez. Suivez le chemin de l'intelligence ! » (Pr 9,5s)
Cet appel de la Sagesse, les chrétiens l'ont transposé d'instinct depuis les premiers siècles : Dame Sagesse n'est qu'une image du Fils de Dieu, venu parmi nous sur terre pour nous donner le pain de l'intelligence, le pain de la foi, sa parole qui nous entrouvre le mystère de Dieu et de son plan d'amour.
Les chrétiens se sont appuyés, pour cette transposition, sur les paroles prononcées par Jésus lui-même dans la synagogue de Capharnaüm : « Le pain de Dieu, c'est celui qui descend du ciel et donne la vie au monde. Moi, je suis le pain de la vie. Qui vient à moi n'aura jamais faim. » Déjà cette audace de Jésus revendiquant le rôle même de la Sagesse de Dieu avait suscité des murmures dans l'auditoire : « Cet homme-là n'est-il pas Jésus, le fils de Joseph ? Nous connaissons bien son père et sa mère. Alors, comment peut-il dire : « Je suis descendu du ciel ? »
L'étonnement des gens, dans la synagogue, va friser le scandale quand Jésus abordera le second thème, clairement eucharistique, de son homélie : « Le pain que je donnerai, c'est ma chair pour la vie du monde. »
La vraie réponse, Jésus la donnera le soir du Jeudi Saint, quand, prenant le pain, puis la coupe, il dira : « Prenez et mangez ; ceci est mon corps livré pour vous. Buvez-en tous, ceci est mon sang » (Mt 26,26s). Mais dès ce jour-là, à Capharnaüm, au lendemain de la multiplication des pains, Jésus développe sa catéchèse eucharistique :
« Ma chair est vraiment nourriture, insiste Jésus ; mon sang est vraiment boisson ». Son Eucharistie est donc nécessaire pour nous, comme est indispensable la nourriture du corps humain, mais pour entretenir et développer une autre vie, que l'on commence à vivre ici-bas, et que Jésus appelle la vie éternelle.
Mais en quoi consiste cette vie éternelle inaugurée dès maintenant dans le quotidien de notre existence ? C'est avant tout une relation intense, profonde, invisible, avec Jésus Fils de Dieu : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi en lui. »
Demeurer, c'est un verbe qui dit tant de choses à la fois qu'il faudrait, pour en épuiser la richesse, toute une litanie, la litanie de la réciprocité :
Jésus vit en moi, et je vis en lui.
Jésus attend mon amitié, et je m'appuie sur la sienne.
Jésus compte sur moi, et je compte sur lui.
Jésus parle en moi, et je lui parle.
Jésus trouve sa joie en moi, et ma joie est en lui.
Jésus prie en moi, et je prie en lui.
Jésus m'aime, et j'essaie de l'aimer.
C'est ce partage intégral et cette intimité que Jésus résume en disant : « Celui qui me mange vivra par moi ». Toute communion à son Corps et à son Sang sera donc une communion à sa vie de Fils de Dieu, et même une communion à sa mission d'Envoyé du Père. En mangeant le Corps du Christ, nous venons nous ressourcer à sa vie, comme lui-même, voyageur parmi nous, se ressourçait constamment à l'amour de son Père : « De même que le Père, qui est vivant, m'a envoyé, et que moi, je vis par le Père, de même aussi celui qui me mange vivra par moi. »
Nous vivrons par lui, car l'Eucharistie est en nous un gage de victoire sur les forces du refus, de l'agressivité et de l'isolement, et même sur celles de la maladie et de la mort. Nous vivrons, car Jésus veut éterniser son amitié avec nous, son partage de vie avec tous ceux qui croient en lui, au-delà de la mort qui nous emportera, et dont l'ombre inquiète parfois les êtres fragiles que nous sommes :
« Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement. Moi, je le ressusciterai au dernier jour. »
« Moi qui suis la lumière, je suis venu dans le monde »
(Jn 12, 44-50)
« En ce temps-là, Jésus s’écria : « Celui qui croit en moi, ce n’est pas en moi qu’il croit, mais en Celui qui m’a envoyé ; et celui qui me voit voit Celui qui m’a envoyé. Moi qui suis la lumière, je suis venu dans le monde pour que celui qui croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres. Si quelqu’un entend mes paroles et n’y reste pas fidèle, moi, je ne le juge pas, car je ne suis pas venu juger le monde, mais le sauver. Celui qui me rejette et n’accueille pas mes paroles aura, pour le juger, la parole que j’ai prononcée : c’est elle qui le jugera au dernier jour. Car ce n’est pas de ma propre initiative que j’ai parlé : le Père lui-même, qui m’a envoyé, m’a donné son commandement sur ce que je dois dire et déclarer ; et je sais que son commandement est vie éternelle. Donc, ce que je déclare, je le déclare comme le Père me l’a dit. »
Sur ces derniers mots du chapitre 12, Jean l'Évangéliste achève le livre des signes.
Juste auparavant il vient de dresser une sorte de bilan du ministère public de Jésus : "Bien qu'il eût opéré tant de signes en leur présence, ils ne croyaient pas en lui" (v.17)."Toutefois, même parmi les notables, un bon nombre crurent en lui ; mais à cause des Pharisiens ils ne se déclaraient pas, de peur d'être exclus de la synagogue, préférant la gloire qui vient des hommes à la gloire qui vient de Dieu" (v.43).
C'est après cette réflexion sur la foi et l'incroyance que l'Évangéliste sent le besoin de citer Jésus lui-même, en reprenant quelques phrases qu'il a proclamées (littéralement : "criées"), et qui résumaient à ses yeux toute son œuvre.
"Moi, la lumière, je suis venu dans le monde". Moi, la lumière... Quelle extraordinaire révélation sur le mystère intime de Jésus et sur la mission qu'il a reçue du Père ! "Toi, la lumière" : quel porche magnifique pour entrer en prière tout au long de notre journée !
"Je suis venu dans le monde afin que quiconque croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres" (v.46).
Ainsi, selon, Jésus, les ténèbres précèdent la foi ; elles sont pour nous le pays d'avant la foi. C'est là que nous demeurons avant de rencontrer Jésus-lumière ; c'est là que nous retournons quand nous quittons sa main. Mais il y a pour nous deux sortes de ténèbres :
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les ténèbres coupables, celles du péché que nous avouons au Seigneur,
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et les ténèbres qui sont simplement des misères de notre affectivité.
Car il nous arrive de revenir aux ténèbres, ou du moins de les laisser s'approcher, de les laisser entrer par les fissures de notre cœur ou à travers les lézardes de la vie communautaire.
Ténèbres de la tristesse, quand nous sommes inquiets pour l'image de nous-mêmes, quand nous nous résignons à l'à-peu-près, tournant le dos à l'élan de notre premier don, ou quand nous cessons de vivre au compte du Royaume.
Ténèbres de lassitude, lorsque nous perdons cœur à nous voir si pauvres, lorsque nous quittons du regard Celui que nous sommes venus servir, lorsque nous nous mettons à calculer ou que nous ne cherchons plus en Dieu seul notre repos.
Ténèbres de solitude, aux heures où nous croyons n'exister pour personne, aux heures où Jésus semble ne plus nous suffire et aux jours où la force nous manque pour faire les premiers pas du pardon.
Pour ne pas rester à mi-pente, pour ne pas "demeurer" dans les ténèbres où l'on marche en aveugle, un seul moyen, un seul réflexe : venir, revenir à Jésus-lumière, entendre ses paroles et les garder.
Jésus, le Fils de Dieu venu dans le monde comme lumière du monde, vient à nous afin d'être pour chacun/e la lumière de l'intelligence et du cœur, la lumière qui fait voir et qui fascine, la lumière qui révèle en chaque être ce qui peut être aimé, la lumière très douce des Béatitudes qui transforme le climat familial ou communautaire.
Et cette lumière d'en haut qui nous vient par les paroles de Jésus investit si largement notre cœur et tout l'espace de notre vie qu'elle peut nous rendre, nous les pauvres, participants de la beauté de Dieu : "Jadis vous étiez ténèbres ; maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur" (E 5,8).
« Veillez, car vous ne savez pas
quel jour votre Seigneur vient »
(Mt 24.42)
« En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Veillez, car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur vient. (Mt 24.42) Comprenez-le bien : si le maître de maison avait su à quelle heure de la nuit le voleur viendrait, il aurait veillé et n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison. Tenez-vous donc prêts, vous aussi : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. Que dire du serviteur fidèle et sensé à qui le maître a confié la charge des gens de sa maison, pour leur donner la nourriture en temps voulu ? Heureux ce serviteur que son maître, en arrivant, trouvera en train d’agir ainsi ! Amen, je vous le déclare : il l’établira sur tous ses biens. Mais si ce mauvais serviteur se dit en lui-même : “Mon maître tarde”, et s’il se met à frapper ses compagnons, s’il mange et boit avec les ivrognes, alors quand le maître viendra, le jour où son serviteur ne s’y attend pas et à l’heure qu’il ne connaît pas, il l’écartera et lui fera partager le sort des hypocrites ; là, il y aura des pleurs et des grincements de dents. »
Deux paraboles sur la vigilance : la première s'adresse à tous, la seconde vise davantage les chrétiens en situation de responsabilité, mais d'une certaine manière, nous le sommes tous.
Dans la première parabole, le raisonnement de Jésus est une sorte de surenchère qui souligne l'urgence de veiller : Si le maître de maison connaissait l'heure de la nuit à laquelle le voleur va venir, il veillerait ... Comprenons : il veillerait quelques heures, pour surprendre l'intrus. Or le voleur ne prévient jamais d'avance ; le propriétaire ne sait pas, et il ne veille pas, car il lui faudrait veiller toutes les nuits ! Eh bien vous, nous dit Jésus, vous ne savez pas, mais il vous faut veiller toujours, comme quelqu'un qui serait toujours sur le qui-vive et qui ne dormirait jamais que d'un œil.
Parce que nous ignorons l'heure où le Fils de l'Homme va venir, il faut nous tenir prêts avec toute l'Église. Parce que nous ignorons l'heure où Dieu nous rappellera à lui, il nous faut rester éveillés, "tout éveillés dans notre foi", et ne pas laisser le voleur percer notre maison. Un trou dans le mur, et toutes les richesses s'en vont en une seule nuit ; un trou béant dans notre fidélité à l'oraison, et notre vie cachée perd son sens ; une brèche dans le mur de la confiance communautaire, et les richesses des cœurs ne sont plus en sécurité.
Dans la seconde parabole, c'est un serviteur qui est mis en scène, mais un serviteur de confiance sur qui son maître croit pouvoir s'appuyer, au point qu'il lui remet une part importante de son autorité et de sa gérance : aux frais de son patron, ce serviteur devra assurer la subsistance de tout le personnel.
Responsabilité de tous les jours, qui se fait lourde à mesure que le temps passe, que l'absence du Maître s'éternise et que son contrôle s'éloigne. "Mon maître tarde", pense l'homme, qui faiblit dans la solitude. Il ne devient pas malhonnête ; non, il ne renie pas totalement ses engagements premiers ; mais il devient agressif avec ses compagnons, ne supportant plus rien ; puis il perd le sens de l'effort et enfin toute dignité personnelle, ne vivant plus désormais que pour manger et boire avec les ivrognes.
C'est la déchéance, puis le châtiment de celui qui n'a pas su veiller, ou plutôt : qui n'a pas su attendre activement le retour du maître. Mais, à l'opposé, Jésus proclame la Béatitude des serviteurs que l'attente n'entame pas dans leur fidélité et qui vivent avec le même sérieux et le même dévouement paisible la présence et l'absence du Maître : "Bienheureux ce serviteur que son maître en arrivant trouvera en train de faire son travail", c'est-à-dire, en train de pourvoir au bonheur des autres. En vérité, il l'établira sur tous ses biens ... Bienheureux ce serviteur sur qui le temps n'a pas de prise : il ne sait pas quand reviendra le Maître, mais il vit chaque journée comme sous le regard de l'absent.
Bienheureux ceux qui ne se lassent pas de servir dans l'ombre où Jésus les a laissés ; le Seigneur leur donnera un cœur universel.
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« Veillez pour être prêts »
(Mt 24, 37-44)
« En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Comme il en fut aux jours de Noé, ainsi en sera-t-il lors de la venue du Fils de l’homme. En ces jours-là, avant le déluge, on mangeait et on buvait, on prenait femme et on prenait mari, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ; les gens ne se sont doutés de rien, jusqu’à ce que survienne le déluge qui les a tous engloutis : telle sera aussi la venue du Fils de l’homme. Alors deux hommes seront aux champs : l’un sera pris, l’autre laissé. Deux femmes seront au moulin en train de moudre : l’une sera prise, l’autre laissée. Veillez donc, car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur vient. Comprenez-le bien : si le maître de maison avait su à quelle heure de la nuit le voleur viendrait, il aurait veillé et n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison. Tenez-vous donc prêts, vous aussi : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. »
Quel curieux passage de l'Évangile l'Église nous fait lire en ce premier dimanche de l'Avent ! Au moment où nous nous préparons à revivre spirituellement la longue attente des hommes de l'Ancien Testament, l'Église nous met devant les yeux le tableau de la fin du monde !
C'est que l'Avent ne commémore pas seulement une venue, mais trois venues, trois avènements du Seigneur :
L'avènement du premier Noël : avènement de pauvreté, et de miséricorde et de grâce ;
A l'autre bout de l'histoire humaine, l'avènement de gloire. Pour le décrire, l'Évangile reprend toutes les images familières aux hommes de l'Ancienne Alliance. Images de cataclysmes dans le monde des hommes et jusque dans le cosmos ; images destinées non pas tellement à nous effrayer qu'à souligner la puissance de Dieu, du Maître de l'univers créé et de l'histoire des hommes.
Entre les deux, entre le premier Noël et le dernier avènement, se situe la venue silencieuse et invisible du Christ Jésus dans notre propre vie, l'avènement mystérieux du Sauveur en chacune de nos journées de joie ou de peine.
Face à ces trois avènements, notre attitude de chrétiens est différente :
L'avènement de Noël, nous ne pouvons que le commémorer ;
L'avènement glorieux de la fin des temps, nous ne pouvons que l'attendre dans l'espérance et le hâter en transformant le monde ;
Mais l'avènement de Jésus Christ et de son amitié dans notre vie personnelle, familiale, communautaire, celui-là, nous pouvons le préparer et l'accueillir jour après jour.
Et saint Paul nous rappelle comment faire:
II s'agit d'abord de "nous tirer de notre sommeil" spirituel, de saisir le salut qui passe à notre portée, ou mieux : Jésus Sauveur qui vient au-devant de nous.
Malgré tant de grâces reçues du Seigneur, malgré tant de preuves de sa fidélité égrenées tout au long de notre vie, notre foi et notre espérance restent comme engourdies, et notre amitié avec Jésus nous apparaît parfois lointaine et irréelle, comme dans un songe. C'est pourtant ce lien au Christ qui est plus vrai que tout le reste ; c'est cette présence invisible du Dieu de notre baptême qui donne un sens éternel à notre travail, à notre dévouement, à nos épreuves.
Il s'agit ensuite de "revêtir le Seigneur Jésus Christ", c'est-à-dire de nous transformer profondément à son image, d'adopter ses réflexes de compréhension, de pardon, d'amour des pauvres, de dignité morale et de loyauté.
Affranchi par le Christ du monde mauvais et des forces de ténèbres, nous ne sommes plus des hommes de dissimulation, des hommes de la nuit, mais des hommes de l'aurore, éveillés et prêts à servir, des hommes du plein jour, et n'avons plus rien à cacher, parce que notre vie manifeste le Christ et témoigne de son amour pour tous.
Rassemblés ce matin au nom du Seigneur pour reprendre force et courage en participant à son sacrifice, pour accueillir le don de son amour, pour préparer dans la prière le jour prochain de Noël "où nous fêterons notre relèvement", tout éveillés dans notre foi, dépassons nos misères intérieures, et mettons-nous en route pour un renouveau de notre fidélité. Responsables de la vraie joie dans le monde, il nous faut entrer dans la grande espérance de l'Église et redire avec elle, en notre nom et au nom de tous les hommes qui attendent notre témoignage:
"Fais-nous voir, Seigneur, ton amour, et ton salut, donne-le nous !"
« Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre »
(Mt 25, 1-13)
« En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples cette parabole : « Le royaume des Cieux sera comparable à dix jeunes filles invitées à des noces, qui prirent leur lampe pour sortir à la rencontre de l’époux. Cinq d’entre elles étaient insouciantes, et cinq étaient prévoyantes : les insouciantes avaient pris leur lampe sans emporter d’huile, tandis que les prévoyantes avaient pris, avec leurs lampes, des flacons d’huile. Comme l’époux tardait, elles s’assoupirent toutes et s’endormirent. Au milieu de la nuit, il y eut un cri : “Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre.” Alors toutes ces jeunes filles se réveillèrent et se mirent à préparer leur lampe. Les insouciantes demandèrent aux prévoyantes : “Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s’éteignent.” Les prévoyantes leur répondirent : “Jamais cela ne suffira pour nous et pour vous, allez plutôt chez les marchands vous en acheter.” Pendant qu’elles allaient en acheter, l’époux arriva. Celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et la porte fut fermée. Plus tard, les autres jeunes filles arrivèrent à leur tour et dirent : “Seigneur, Seigneur, ouvre-nous !” Il leur répondit : “Amen, je vous le dis : je ne vous connais pas.” Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure. »
L'époux vient chercher sa promise pour la conduire chez lui : c'est l'image du Christ, Époux-Messie et Juge des derniers temps, qui viendra chercher sa communauté pour l'introduire dans sa propre gloire. Les demoiselles d'honneur qui doivent accueillir puis escorter l'époux symbolisent la communauté de Jésus, tous ses fidèles qui attendent la Parousie.
Mais attendre ne suffit pas : il faut se préparer, pour être à tout moment en état d'accompagner le Christ. Vigilance d'autant plus urgente que l'heure de son retour n'est pas prévisible. Aucun signe annonciateur ne permettra de trouver des expédients de dernière heure : au moment du cri : "Voici l'époux ! ", il sera déjà trop tard.
Cette nécessité de la vigilance nous aide à comprendre le refus de partager l'huile au moment où l'époux arrive. Au premier abord, on serait tenté d'y voir un manque d'entraide ou un signe d'égoïsme ; en réalité Jésus, dans sa parabole, souligne qu'un devoir plus pressant doit mobiliser à ce moment toutes les énergies : il faut, en priorité, que l'époux soit éclairé et fêté sur tout son parcours jusqu'à l'entrée dans la salle des noces. Les insouciantes ne peuvent s'en prendre qu'à elles-mêmes.
D'où la réponse sévère de l'époux derrière la porte close : il fallait être là au bon moment, et donc prévoir des réserves suffisantes pour durer ! La rencontre décisive avec le Seigneur ne s'improvise pas. Pour être prêt à l'heure, il faut se préparer à toute heure, et maintenir éveillée la flamme de la foi au Christ. C'est le sens de la réserve d'huile : dans le judaïsme, l'huile symbolisait les bonnes œuvres, mais aussi la joie de l'accueil ; ici, dans la parabole, l'huile gardée en réserve mesure la qualité de l'amour de celles qui acceptent de veiller.
De cette parabole lumineuse de Jésus, emportons simplement quatre thèmes, qui pourront nourrir notre méditation durant cette semaine.
Inlassablement, le Christ tourne nos regards vers le terme, mais toujours d'une manière tonique et dynamisante ; car ce terme, terme de l'existence ou terme de l'histoire, sera le début d'une communion décisive avec la vie de Dieu. Bien plus, il nous est donné d'anticiper cette communion dans la prière et le service du Maître. C'est le sens de notre fidélité ; c'est tout l'enjeu de notre vigilance : une lampe à moitié vide ne tiendra pas la soirée, une vie à moitié donnée tiendra-t-elle jusqu'à la venue du Seigneur ? Personne ne peut veiller à notre place, car il y va de la qualité du cœur. On aime ou l'on ne sait pas aimer. On attend ou l'on ne sait plus attendre ; mais l'amour ne s'achète pas chez le marchand.
Autre enseignement de notre Évangile : le Christ des Béatitudes n'a pas craint de se présenter avec insistance comme le Seigneur qui jugera ; et l'on ne peut éliminer cette dimension du jugement sans tronquer le message de Jésus. Pour lui, comme pour les prophètes, toute allusion au jugement, donc tout appel à un usage authentique de notre liberté, fait partie d'une pédagogie d'amour et de salut. Notre foi est ramenée par là au réalisme de l'Evangile : ni crainte obsessionnelle devant Dieu, ni désinvolture devant l'urgence du Royaume, mais vigilance active. La mise en œuvre fidèle des talents reçus du Seigneur, et le souci des plus petits parmi les frères du Christ, voilà la réserve d'huile qui permettra à la flamme de repartir, même après une somnolence.
En troisième lieu, Jésus nous présente la vie à sa suite comme une vigilance qui prépare la fête. Il n'y aura pas de fête s'il n'y a pas de veille, mais veiller pour le Christ est déjà une fête.
Enfin la parabole de Jésus nous rappelle une dimension essentielle de l'Eucharistie. Si en effet l'Eucharistie est bien mémorial des œuvres de Dieu en Jésus-Christ, si elle est accueil de la vie de Dieu dans l'aujourd'hui des hommes, chaque messe est aussi une annonce prophétique du retour du Seigneur : "nous attendons ta venue dans la gloire." Chaque messe vient réveiller l'espérance du peuple de Dieu ; et pour nous qui aimons le Seigneur, c'est un moment béni de vigilance.
« Courage ! Moi, je suis vainqueur du monde »
(Jn 16, 29-33)
« En ce temps-là, les disciples de Jésus lui dirent : « Voici que tu parles ouvertement et non plus en images. Maintenant nous savons que tu sais toutes choses, et tu n’as pas besoin qu’on t’interroge : voilà pourquoi nous croyons que tu es sorti de Dieu. » Jésus leur répondit : « Maintenant vous croyez ! Voici que l’heure vient – déjà elle est venue – où vous serez dispersés chacun de son côté, et vous me laisserez seul ; mais je ne suis pas seul, puisque le Père est avec moi. Je vous ai parlé ainsi, afin qu’en moi vous ayez la paix. Dans le monde, vous avez à souffrir, mais courage ! Moi, je suis vainqueur du monde. »
"Vous allez être dispersés, chacun allant de son côté, et vous me laisserez seul".
Jésus a connu la solitude, beaucoup plus qu'on ne le pense, la solitude de ceux qui ne biaisent pas avec leur mission et qui acceptent de porter sans se faire porter, de servir sans se faire servir. Et de sa solitude, Jésus parle à plusieurs reprises.
Une première fois après son discours sur le pain de vie, dans la synagogue de Capharnaüm : "À partir de ce moment beaucoup de ses disciples reculèrent, et ils ne circulaient plus avec lui". Au point que Jésus a demandé aux Douze : "Est-ce que vous aussi, vous allez partir ?" (Jn 6,66s).
Un autre moment, terrible, de la solitude de Jésus a été la nuit de l'agonie, lorsque, revenant vers ses disciples, il les trouva endormis : "Ainsi, leur dit-il, vous n'avez pas eu la force de veiller une heure avec moi ?" (Mt 26,40).
Mais lors de la Cène, ce dernier repas qu'il a partagé avec un traître et onze lâches, Jésus a entrevu une autre désertion des disciples, celle qui allait avoir lieu au moment de son arrestation : "Alors, raconte saint Marc, ses disciples l'abandonnèrent et prirent la fuite" (Mc 14,50).
Jésus a donc souffert de la solitude, mais il ne s'y arrêtait jamais, car sa solitude humaine était habitée par une présence infiniment douce et forte, celle de son Père, source de sa mission et modèle de son action :
"Mon jugement est véritable, parce que je ne suis pas seul, mais il y a moi et celui qui m'a envoyé" (8,16).
"Celui qui m'a envoyé est avec moi, et il ne m'a pas laissé seul, car moi, c'est ce qui lui plaît que je fais toujours" (8,29).
Ainsi Jésus, qui a certainement été peiné du manque de courage des disciples, n'en a jamais été paralysé, parce qu'il vivait constamment pour le plaisir de Dieu, dans le souvenir du Père.
Savons-nous vivre notre solitude ?
Solitude des parents, qui voient leurs enfants "partir chacun de son côté" ; solitude des époux, qui traverse parfois même l'amour le plus fidèle ; solitude des consacrés, qui ont voué à Dieu, en une fois, toutes leurs forces d'aimer, misant loyalement sur la force du soutien fraternel, et qui s'aperçoivent, les années passant, que la communauté est avant tout le lieu où l'on donne, où l'on sert, où l'on s'oublie, avant d'être le lieu où l'on trouve stimulation et réconfort.
Nous que Jésus a rassemblé(e)s pour que nous offrions ensemble, au nom de toute l'Église missionnaire, le sacrifice de louange ou le sacrifice "du soir" de la vie, savons-nous habiter, assumer, dépasser notre solitude ? Savons-nous en faire un lieu d'intimité avec le Père ?
"Je ne suis pas seul, disait Jésus, parce que le Père est avec moi".
Vivre sa solitude comme Jésus l'a vécue, c'est ne rien attendre, ne rien guetter, ne rien réclamer pour soi, et se remettre chaque jour en route vers la solitude des autres ; c'est s'estimer heureux, "bienheureux", d'être regardé, aimé, visité, par Dieu au cœur de Père ; c'est ne jamais s'étonner de rencontrer la croix à la suite de Jésus ou de trouver, à certains jours, même les meilleurs amis dispersés ou endormis.
Vivre notre solitude comme celle de Jésus, c'est laisser, au cours de nos journées, une place grandissante à la tendresse de Dieu.
Alors il devient possible, non seulement d'aller jusqu'au bout de notre dévouement, mais de vivre chaque heure pour le plaisir du Père et de rester en acte d'offrande. Alors notre solitude devient "sonore", toute bruissante des louanges de l'Église et de la rumeur du monde à sauver. Au creux de cette solitude, Jésus nous donne un cœur universel.
On n'est jamais seul quand on vit pour Lui seul.
Au moment de votre jugement, à votre mort...
À des religieux & laïcs auxquels il est apparu, Jésus a confirmé : « Vous serez jugés sur l'amour ». Il entend par là l'amour que l'on peut avoir pour Dieu, bien sûr, mais aussi l'amour et le soin que l'on peut avoir les uns pour les autres.
Dieu a envoyé des prophètes, puis son Fils, pour vous prévenir de son existence, de la nécessité de faire le bien pour vivre en bonne harmonie sur terre, puis avec lui éternellement. Il a fait en sorte que Jésus et les Évangiles soient connus du monde entier. Il convertit toutes sortes de personnes (athées, personnes d'autres religions...) pour qu'ils soient des signaux, de petites lumières autour de vous afin d'éveiller votre attention.
Pourrez-vous dire que que vous ne saviez pas ?
Néanmoins, si vous doutez toujours de l'existence de Dieu, de son amour et de sa miséricorde pour vous, gravez ceci dans votre mémoire. À l'instant de votre mort,
lorsque vous Le rencontrerez, votre âme sera submergée
par l'immensité de Son Amour pour vous,
de Sa Sainteté devant laquelle même un saint vacille.
Chaque action de votre vie sera mise en lumière,
vous ressentirez profondément les
occasions ratées.
Jésus vous demandera : "As-tu aimé ?"
Si au fond de votre cœur la réponse est délicate car vos actes d'amour sincère envers les autres ont été rares , si vous comprenez ce vous avez raté et combien l'absence de Dieu et de son amour pour l'éternité pourrait à présent vous être insupportable... suppliez Jésus, le PHARE dans cet abîme, de vous faire miséricorde, hurlez un S.O.S. :
© Si je l'avais écouté - Manou
© Mieux vaut un jour avec toi - Dan Luiten